S’adapter et rebondir sur un marché en mouvement : focus sur Icone Lingerie
Co-fondateur de la marque française, Darren O’Riain raconte comment elle a su s’adapter aux aléas économiques du secteur, et livre ses conseils aux jeunes exposants du Salon International de la Lingerie.
Fondée en 2014, Icone Lingerie a su appréhender avec brio les mouvements du marché et adapter sa stratégie en temps réel. Née de la volonté de proposer aux femmes des pièces à la fois esthétiques et confortables, qui accompagnent le corps sans le contraindre et soulignent la féminité dans toutes ses subtilités. Elle s’inscrit également dans une approche pragmatique du commerce et du développement, sachant adapter son positionnement, maintenir une démarche commerciale saine et construire des tremplins là où ne l’attend pas. Rencontre avec son co-fondateur Darren O’Riain.
Parlez-nous de votre relation avec le Salon International de la Lingerie.
Nous sommes présents sur Exposed depuis sa deuxième édition. À l’époque, Matthieu Pinet nous avait fait une approche très personnelle, adaptée à notre échelle, ce qui est très appréciable pour une jeune marque. Être présents sur le salon, parmi les petits et les grands acteurs, français et étrangers, nous a donné une crédibilité en tant que marque de lingerie. C’est aussi l’occasion de prospecter et de rencontrer nos clients, d’échanger en direct, de mieux se comprendre et de fluidifier les relations.
Comment approchez-vous cette nouvelle édition ?
Nous proposons des préventes pour la première fois, en plus des ventes habituelles. Plutôt que de d’imposer l’un ou l’autre nous laissons le choix aux clients : acheter l’été avec une livraison le mois prochain, ou précommander l’hiver. Cela nous permet de tester nos choix en direct, de voir ce qui fonctionne et de s’adapter au marché en temps réel.
Parlez-nous de l’évolution de votre positionnement.
Ça s’est fait petit à petit. En constatant une forme de ralentissement du marché ces dernières années, nous avions deux choix : sacrifier la qualité pour miser sur des prix moins chers, ou prendre le chemin inverse et montrer en gamme. Nous sommes donc passé d’un positionnement milieu de gamme à haut de gamme, avec 100% de matière première française ou européenne, des teinturiers français et une vraie volonté de mettre en avant ces savoir-faire.
Pourquoi ce choix ?
Quand on travaille en mono-produit, comme c’est le cas dans la lingerie, il faut savoir rebondir rapidement. Nous sommes partis du principe que dans les années à venir, les gens allaient consommer soit moins, soit mieux, de façon plus responsable. Ça avait donc du sens de proposer des lignes de cotons bios, une fabrication portugaise, mais aussi de développer les gammes, en travaillant quatre saisons plutôt que deux. Cela créé plus de rendez-vous avec nos clientes et des propositions plus en phase avec le climat : il fait de plus en plus beau, de plus en plus tard, sortir une collection hiver au mois de septembre a donc de moins en moins de sens selon nous. À la place, nous proposons par exemple des modèles automnaux plus clairs sur les mois d’aout et de septembre, et des choses plus foncées à l’entrée de l’hiver.
Vous développez également le prêt-à-porter.
Nous avons fait ce choix l’an dernier, en collaborant avec la marque de chaussures Bobbies. En tant que marque de lingerie, proposer du prêt-à-porter faisait sens pour créer le lien avec la chaussure, nous avons donc imaginé des robes, qui ont été un réel succès puisque tout le prêt-à-porter a été en rupture de stock ! Se lancer sur ce segment est aussi une façon d’anticiper les doutes de nos revendeurs lorsqu’ils craignent une baisse des ventes de lingerie. On leur donne l’opportunité de proposer de nouveaux produits qui maintiennent le lien, toujours dans l’ADN d’Icone, de ses matières et de ses coloris.
Dans le même esprit, nous préparons une nouvelle collaboration avec la marque Laurence Bras. Nous imaginons quelques pièces de lingerie pour leur collection hiver, et eux de prêt-à-porter pour notre collection été. Les collaborations sont une bonne façon de se réorienter, dans une vision collective qui fait sens puisque nous partageons la même éthique et le même souci de qualité. Les deux marques sont ainsi gagnantes, profitent de leur image et de leurs réseaux mutuels.
Comment naviguez-vous entre les différents canaux de vente ?
À l’inverse de nos concurrents, qui sont nés avec Internet, nous avons commencé notre chemin en boutiques multimarques, puis en grands magasins, avant de développer notre site. Les choses s’accélèrent désormais en ligne mais il est très important pour nous de respecter nos revendeurs, car c’est grâce à eux que nous sommes là. Aujourd’hui, la multiplication des soldes et des promotions fait beaucoup souffrir ces réseaux, nous avons donc choisi de ne faire aucune démarque hors périodes de soldes. Les jeunes marques ont tendance à suivre ce mouvement, à contrecœur, mais se tirent des balles dans le pied car ces promotions ne génèrent pas nécessairement plus d’argent, et font chuter les ventes des grosses périodes comme celle de Noël. Nous continuons de croire aux revendeurs, et à notre boutique parisienne, comme sources d’achat coup de cœur, où le prêt-à-porter peut désormais contribuer à contrer les périodes plus lentes.
Comment s’est passé cette nouvelle édition du Salon International de la Lingerie ?
Nous ne sommes pas déçus ! Nous avons eu beaucoup de passage, dans des profils très éclectiques. C’est l’occasion de reconnecter, de rencontrer du monde, d’ouvrir des possibilités avec de nouveaux réseaux à l’international.
Quels conseils donneriez-vous à une jeune marque qui se lancerait sur le salon ?
Ne jamais venir qu’une fois ! Sur un salon tel que celui-là, la régularité paye. La première fois sera forcément un peu intimidante en tant que jeune marque que personne ne connaît encore, mais il faut persévérer car au bout de deux ou trois salons, les acheteurs commencent à vous repérer et à être curieux. Il faut être patient, c’est sur la durée que les choses se font. Il faut aussi garder en tête que les profils qu’on rencontre ici ne sont pas tout à fait les mêmes en fonction des saisons, il est donc important de revenir.